Après quatre années passées au CFWB, Bethy Mununga a décidé de poursuivre son cursus basket et académique aux States. Entretien en pleine « March Madness » avec une joueuse talentueuse qui a la tête sur les épaules.
Bethy, combien de temps as-tu passé au CFWB ?
J’ai complété mes quatre années au CFWB, de l’année 2012 à l’année 2016.
Comment s’articulait ton quotidien à l’époque ?
Il était très répétitif mais cela dépendait de mon horaire académique et puis de mon horaire basketball.
Peux-tu nous raconter une journée type ?
Le matin, chacun gère son alarme pour se réveiller puis a lieu le petit-dej’ avant huit heures, heure à laquelle nous partions en cours. Nous restions à l’école jusque seize heures trente max mais quand j’avais des heures de fourche durant la journée, j’avais des entrainements individuels avec des coachs au Centre. Sinon, lorsque ma journée scolaire était finie, j’avais un goûter avec les autres à la cafétaria puis entrainement à dix-sept heures. Après l’entrainement, nous allions souper puis faire nos devoirs, soit dans nos chambres, soit dans la salle d’étude. Quand j’avais parfois entrainement plus tard, vers dix-neuf heures, je faisais d’abord mes devoirs en attendant le souper.
Que t’a apporté cette période au CFWB ?
Le CFWB m’a permis de développer énormément de « skills » qui m’aident et que je continue encore à développer aujourd’hui. Mais ce n’est pas tout. La première valeur que j’ai dû acquérir à Jambes, c’était d’être capable de vivre en groupe. A l’époque, j’étais une personne très réservée, renfermée sur moi-même et je n’aimais pas trop tout ce qui était ambiance, grand groupe, etc. Arrivée au Centre, je n’avais pas d’autre choix que d’être « confortable » avec les gens qui m’entouraient. J’ai appris à m’ouvrir et à créer des liens avec des inconnus qui sont devenus des amis. Et j’en considère même certains comme des membres de ma famille. Une autre qualité que j’ai vraiment développée là-bas, c’est la capacité à suivre un horaire bien précis. Avoir un programme fixe pour une semaine m’a obligée à être organisée et à planifier mes temps de repos, mes heures d’étude, les moments où je pouvais profiter avec mes amis… J’ai dû me responsabiliser pour éviter de ressentir les conséquences inéluctables si je me laissais déborder.
Quelles sont les forces du CFWB ?
Il y en a beaucoup, notamment la responsabilisation en devant assumer les conséquences de nos actes, l’organisation, l’indépendance que cela procure car nous n’y avions pas papa et maman à nos côtés pour nous aider et la collaboration et la communication avec l’école, les éducateurs et les autres pensionnaires.
Si tu devais résumer tes quatre années au CFWB en trois mots, lesquels choisirais-tu ?
Apprentissage, découverte et relations. Tout d’abord apprentissage car nous y apprenions tous les jours, que cela soit à l’école ou au niveau basket. Ensuite découverte car nous nous y découvrions nous-mêmes avant tout. Nous découvrions notre vraie personnalité, un nouvel environnement – en apprenant ensuite à s’y adapter – mais aussi de nouvelles personnes, de nouvelles cultures, un autre mode de vie et j’en passe. Enfin, relations car nous nous en sommes créées beaucoup, aussi bien avec les membres du staff et les autres pensionnaires qu’avec des gens à l’extérieur à l’école, sur la route ou pendant les matchs.
Quels sont tes meilleurs souvenirs de ta période au CFWB ?
Des souvenirs, j’en ai beaucoup, des bons comme des mauvais d’ailleurs. Ce que je retiens avant tout, ce sont les amis que je me suis fait là-bas. Ce sont des personnes que je peux appeler frères et sœurs aujourd’hui et avec qui je reste en contact. Nous nous appelons parfois ou nous parlons sur les réseaux sociaux. Et quand je rentre à Bruxelles, j’en croise certains par chance. J’ai vraiment gardé de très bon contacts avec beaucoup d’entre eux et même si nous ne nous parlons pas tous les jours, nous nous sentons très nostalgiques quand nous nous revoyons.
« Je vis comme une princesse à l’université »
Tu es aux Etats-Unis depuis maintenant plusieurs années. Tu as d’abord fréquenté un « JuCo » avant de rejoindre South Florida University.
L’expérience que j’ai eue de mes deux années en Junior Collège, à Northeastern Oklahoma A&M, est complètement différente de celle que je suis en train de vivre actuellement à l’université de Floride du Sud. En Juco, je vivais dans les dortoirs situés sur le campus même. Vivant dans les dortoirs, les contacts entre les sportifs et les étudiants réguliers étaient très étroits. La distance du dortoir jusqu’à la salle, la cafétaria, les classes, était très courte. Désormais, à l’université, j’habite dans un appartement en dehors du campus – j’habite juste en face de l’école, je traverse la rue et j’y suis (rires). Par contre, ici tout est très grand et très dispersé. Je me rappelle d’un semestre où j’avais cours à l’opposé de là où j’habite. Cela m’a pris une heure pour y arriver. J’ai même dû utiliser mon GPS (rires). J’en rigole aujourd’hui mais, à l’époque, je voulais pleurer.
Quelles sont les autres grandes différences entre ces deux systèmes ?
En JuCo, je devais me gérer moi-même. Si j’avais un problème, je devais trouver moi-même une solution. Le coach pouvait m’orienter mais c’est moi qui devais faire les démarches nécessaires. Je me devais d’être autonome et responsable. Mon papa m’envoyait de l’argent de poche que je devais utiliser à bon escient. Les horaires variaient beaucoup, je devais être prête à n’importe quel imprévu et demeurer très flexible.
C’est l’inverse à l’université ?
A l’université, je vis comme une princesse. Tout est pris en charge par la fac et je ne me soucie de rien. Si je ne me sens pas bien et que j’ai besoin de voir un docteur, par exemple, il viendra à moi ou on m’obtiendra un rendez-vous dans les jours qui suivent. Si j’ai des soucis scolaires, j’ai un « academic advisor » que je peux contacter à n’importe quel moment. Si j’ai besoin d’un tuteur, je passe un appel et c’est réglé. J’ai un horaire programmé pour le mois, je peux donc planifier ce que je souhaite faire pendant mes jours de congé, par exemple. Par contre, vivant en appartement, je dois payer mon loyer et être responsable de mes consommations. Je fais très attention à mon alimentation, donc je me prépare moi-même à manger.
Ton aventure outre-Atlantique te rappelle-t-elle tes années au CFWB ?
Mes expériences ici ressemblent en effet un peu à celles du CFWB mais sous une autre forme et un autre aspect. Les valeurs acquises au Centre m’aident beaucoup à vivre ici et certaines – organisation, respect des horaires, autonomie, indépendance – se renforcent encore davantage.
Quelles sont tes aspirations pour la suite ?
Elles sont nombreuses. Je suis sur le point d’obtenir mon diplôme en Sciences de la Santé Générale avec une spécialisation en infirmerie. Je compte poursuivre mes études car c’est la seule chose qui puisse me donner une certaine « sécurité » pour le futur. Cependant, je ne compte pas abandonner le basket maintenant. J’ai fait tellement de sacrifices que ce serait du gâchis pour moi de tout arrêter. Le basket m’a fait vivre énormément de choses et m’a ouvert énormément de portes. Je veux encore en ouvrir plein d’autres.
N.B. : cet entretien fait partie d’une série d’articles en partenariat avec l’AWBB dont les précédents peuvent être lus ici, ici, ici ou encore ici.