Les Carnets du basketteur, saison 4 ! La récente visite du Pape en Syrie et la suppression des carnavals et autres laetares. Voilà bien deux évènements que tout oppose. Et pourtant…
Nous sommes début mars 2016 et je prends en photo Walid Saei – se demandant visiblement ce qui lui arrive – entouré du prince carnaval de Dison et de sa demoiselle d’honneur. On est sur le coup de 17 heures ce dimanche-là et le garçon, un zeste intimidé, vient de boucler son tout premier match avec le Stade Disonais, en 1ère Provinciale liégeoise. Nous rejoignons ensuite un vestiaire annexe et il me raconte, dans un anglais hésitant, son incroyable épopée… « Il faut savoir que j’ai toujours vécu à Alep, au nord-ouest de la Syrie, où mon papa est dentiste et où les catholiques ne cessent d’être persécutés. Après mes études en tourisme, je suis devenu footballeur professionnel pour le compte du club de Hutteen, en D1. Comme la situation devenait intenable, j’ai décidé avec mon épouse de fuir mon pays. Par l’entremise de passeurs, nous avons ainsi traversé clandestinement la Grèce, avons rejoint sur un rafiot la Turquie puis ce fut la longue traversée de toute l’Europe – au cours de laquelle, on nous a volé l’ensemble de nos bagages – pour aboutir, six mois plus, tard en Belgique. » Et plus précisément au camp de réfugiés à Wayai, près de Sart. C’est alors que Dany Beaupain, un des bénévoles du centre, remarque les indéniables talents footballistiques du garçon. D’où son arrivée au sein de la formation des hauteurs verviétoises.
« Mais, je sais que j’ai le potentiel pour évoluer plus haut et, déjà en Syrie, je rêvais du Standard de Liège », me confie-t-il encore le sourire aux lèvres. Si techniquement, il tient parfaitement la comparaison, il éprouvait néanmoins de réelles difficultés à s’imposer sur le plan physique et collectif. D’où ses transferts successifs et moins glorieux à Aubel (P2) puis à Bullange, au plus bas niveau provincial, son club actuel.
« En revanche, il constitue une réelle réussite professionnelle », indique, admiratif, son « ange gardien » sartois, « Il boulotte comme un dingue pour placer sa petite famille (deux jeunes enfants) dans les meilleures conditions matérielles possibles. Il travaille ainsi depuis un certain temps déjà au « O’Tacos », dans le centre de Verviers, où il semble donner entière satisfaction. Pour preuve, il a été récemment invité à l’inauguration de la nouvelle implantation de cette chaîne à Aix-la-Chapelle en raison de ses prestations exemplaires au restaurant des bords de Vesdre. »
Walid Saei ou une intégration qui force le respect.
Michel Christiane
Crédit photo : Facebook