Le basketball, comme tous les sports venus d’outre-Atlantique, fait la part belle aux statistiques. Bien que joueurs, staffs et amateurs en soient particulièrement friands, quels rôles jouent-elles réellement? Nous avons rencontré André Fawe, responsable stats du BC Ninane, pour mieux comprendre l’impact de ces données chiffrées.
André Fawe, « Dédé » comme surnommé par nombre d’entre-nous, a commencé à pratiquer la balle au panier à Saint Joseph Chênée à l’âge de onze ans. Par la suite, il a entraîna des équipes de jeunes dans ce même club ainsi qu’à Ninane où il fut également responsable des jeunes pendant une saison.
Dédé, comment en es-tu venu à faire les statistiques pour le club calidifontain?
J’ai repris le « scouting » après le départ d’Yvan Fassote, il y a une dizaine d’années. Auparavant, j’assistais déjà le papa de François Lhoest dans ce domaine. Quand il a arrêté, j’ai endossé la fonction. C’était alors Pascal Mossay l’entraineur de notre équipe de deuxième nationale.
A quoi servent les statistiques?
Elles permettent de donner une idée de la situation du match sur deux aspects. Le premier est individuel et offre la possibilité de connaitre les performances d’un joueur. Le second est collectif et donne à voir la situation collective de l’équipe.
L’informatisation des donnés
Les stats, comme le basket, ont connu une évolution ces dernières années…
Tout à fait. Auparavant, chaque équipe faisait son propre scouting manuel -que nous continuons d’ailleurs à faire- lors de chaque rencontre. Mais, il y a trois ans, la fédération a rendu obligatoire de réaliser des statistiques informatisées pour chaque club de l’EuroMillions Basketball League et de TDM1.
Cela a forcément du engendrer quelques complications?
En effet car nous n’étions pas équipés pour cela. Il a fallu installer du wifi dans la salle, se mettre à jour d’un point de vue informatique et, surtout, se former. Nous devons désormais être capables d’utiliser le logiciel de Fiba LiveStats sous peine d’amende.
Comment vous êtes-vous formés à ce nouvel outil?
Il y a bien eu des formations à Bruxelles, mais elles étaient minimalistes. Il s’agissait plus d’informations que de formations à vrai dire. J’ai alors contacté Margaux Michel, la responsable statistiques de Liège Basket. Elle est reconnue pour être la meilleure statisticienne informatique du pays. Elle est venue dispenser des formations, former les principaux intéressés pendant un match et assurer le suivi. Le résultat s’est avéré à la hauteur de nos attentes. Deux de nos cadets, Cyril Van Michel et Maxime Bodson, sont tout à fait opérationnels et remplissent en temps réel le programme de la Fiba.
Concrètement, comment cela se passe-t-il désormais?
Tous les clubs travaillent avec le logiciel officiel et les statistiques sont désormais visibles en live. Elles sont, de plus, collectées pour toutes les formations de D1 et D2, ce qui permet à chaque matricule d’avoir accès à une large base de données chiffrées. C’est à charge du club qui reçoit de réaliser les statistiques de la rencontre. Il doit, à chaque quart-temps, fournir une feuille imprimée avec les chiffres de ces dix minutes.
Que penses-tu de cette évolution?
Il y a évidemment beaucoup de positif. La Fédération peut désormais utiliser ces informations chiffrées pour faire connaitre les joueurs et les afficher en « vitrine ». A contrario, l’accès à ces données étant libre, il facilite la capacité d’un autre club à se renseigner sur les joueurs et augmente la potentialité de voir un de nos gars se faire débaucher. Enfin, nous continuons à faire un scouting manuel car cela nous permet, en déplacement, de le confronter avec le souting local et aussi de pouvoir donner des informations en temps réel.
Des informations utiles
Justement, transmets-tu des informations directement au coach pendant le match?
Le règlement l’interdit, je dois passer par l’assistant-coach. Mais quand il y a une info urgente, nous la faisons directement parvenir. Cela peut être une faute d’un joueur de chez nous ou encore qu’un adversaire vient de prendre deux rebonds offensifs consécutifs.
Comment le coaching staff utilise-t-il ces données?
Elles sont surtout utiles à Mark Hawley pour préparer son speech de la mi-temps. A la fin du deuxième quart-temps, nous faisons le point rapidement avec lui. Il utilise surtout les fautes, les turnovers et les rebonds offensifs en ce qui concerne nos adversaires. Pour sa propre équipe, il s’inquiète principalement des pourcentages aux shoots, des rebonds et des contre-attaques.
Les stats restent sujettes à interprétation
Des contre-attaques? Comment sont-elles définies?
Selon la règle en vigueur, il s’agit d’une attaque réalisée en sept secondes ou moins.
Une autre règle prête également à confusion: comment enregistrer une passe décisive…
Oui, dans les statistiques, une certaine interprétation rentre en vigueur. En ce qui concerne l’assist, c’est lorsque la dernière passe permet au shooteur d’inscrire son panier sans dribbler. Mais, dans le cadre d’une contre-attaque par exemple, si le joueur effectue un dribble après réception de la passe avant d’inscrire son lay-up, la passe est accordée.
En somme, il ne faut pas que le dribble serve à effacer un défenseur?
Tout à fait. Le rebond est également délicat car s’il y a juste une touche du ballon, comment celle-ci doit-elle être comptabilisée? Il convient d’être le plus précautionneux et attentif possible, en fonction de la situation qui en découle.
Une attention constante
Vit-on le match de la même manière quand l’on doit s’occuper de collecter les statistiques?
Non, bien évidemment. Il faut être particulièrement concentré et rigoureux. Il faut parfois inscrire quatre données différentes en quelques secondes. Cela nécessite une attention constante et une rapidité d’exécution. Pour ma part, avec mon expérience et grâce à mon adjoint Vincent Lobet, je revis un peu les matchs de manière plus classique même s’il faut veiller à rester focus un maximum.
Dès lors, à quoi faut-il être particulièrement vigilant quand l’on est assigné à cette tâche?
Il ne faut pas tomber dans le travers du spectateur. Rester concentré jusqu’au coup de sifflet final. En fin de match, même si la victoire est acquise, il faut remplir les statistiques jusqu’au bout. C’est un rôle participatif, certes, mais qui demande une certaine neutralité.
Dédé, tu as dû, depuis le temps, être le témoin et le rapporteur de statistiques monstrueuses?
Bien sûr. François Lhoest, avec ses points, ses rebonds, ses fautes provoquées pouvait rendre une ligne de stats proprement gargantuesque!
Y-a-t-il une anecdote dont tu te rappelles?
Il y en a beaucoup. Il faut savoir que le joueurs sont très friands de connaitre leurs stats à la fin du match. Mais cette année, par exemple, nous avons deux joueurs qui connaissent eux-mêmes leurs statistiques pendant la rencontre. Ils savent te dire combien de points ils ont inscrits ou combien de rebonds ils ont gobés. C’est assez cocasse.