Tirs à l’anneau ou de pruneaux

Les Carnets du basketteur, saison 4 ! Une chronique qui nous fait voir du pays, de Bruxelles à Zagreb en passant par Venise, Vienne et Verviers.

La situation problématique dans laquelle se trouve actuellement Maxime De Zeeuw m’a fait penser au véritable marathon que j’ai vécu avec l’équipe belge à l’automne 93. Précision initiale et primordiale : la guerre dans l’ex-Yougoslavie a débuté deux ans auparavant et se prolongera, par exemple, en Croatie jusqu’en 1995.

Outre un staff composé du quatuor Stevens-Smets-Dujardin-Moulin, le duo Souverijns-Marnegrave vient de reprendre ceux que l’on n’appelaient pas encore les « Lions ». En qualification à l’Euro 95, ils s’inclinent, à l’Armistice 93, 56-62 devant la Suède à Braine. C’est alors que débute un incroyable périple que j’effectue pour la DH et la Libre. Le 12 novembre, nous embarquons à Zaventem, direction Venise car l’aéroport de Zagreb est toujours démoli. Au bord des canaux, nous montons dans un car afin de rallier la Croatie non sans avoir franchi – après d’interminables contrôles – les frontières italo-slovène et slovéno-croate. Nous sommes hébergés dans un palace hollywoodien à Opatija, une splendide station balnéaire ressemblant à la Riviera italienne et où Tito avait ses habitudes. Il y reçut notamment Kadhafi, l’empereur d’Ethiopie, ou encore, Khrouchtchev. Pour nous rendre à l’immense « Dvorana Mladosti » de Rijeka (photo), nous sommes escortés par deux jeeps blindées dont les occupants sont armés jusqu’aux dents. Arrivés sur place, il n’y a pas de match : 92-58 en faveur d’une équipe « aux damiers » emmenée par Stojan Vrankovic (2,18 m, futur Celtics et Clippers aujourd’hui boss de la fédé croate). La ferveur du « nouveau » peuple croate est sans borne alors qu’aux quatre coins du terrain, on retrouve des militaires casqués, en treillis et fusils prêts à intervenir. Tandis que d’autres montent la garde dans les gradins. Retour à l’hôtel d’Opatija où les (déjà) nantis du pouvoir – et leurs spectaculaires compagnes – coulent des jours heureux en toute impunité et en dépensant des fortunes au casino faisant partie de l’infrastructure hôtelière.

Dans la matinée du 15, on revient à Venise où nous attend un avion pour Vienne. Dès midi, repas de gala dans les (magnifiques) caves de l’hôtel de ville de la capitale autrichienne. Tout récent président de la fédération belge, Cyriel Coomans y tient sa première conférence de presse. On a de suite compris que notre basket est entre de (très) bonnes mains. A la sortie, notre guide nous propose une visite du marché de Noël qui vient d’ouvrir. Pas le temps de souffler que l’on remonte dans un autre car ayant la Slovaquie pour destination. Sous une véritable tempête de neige, nous arrivons la frontière. Notre arrêt s’éternise en raison de l’excès de zèle évident des douaniers du cru. Samaey en profite pour aller se soulager. Quand il reprend place, un journaliste flamand s’écrie : « Eh Rik, quand t’es parti t’étais tout roux et quand t’es revenu t’es tout blanc ». Hilarité générale. On rejoint finalement Prievidza où, le 17, les nôtres sont à nouveau évincés sur le score de 73 à 71. Le lendemain à la fine pointe de l’aube, départ pour l’aéroport de Vienne où nous décollons pour Bruxelles-National avec atterrissage en fin d’après-midi. Encore faut-il revenir à Verviers Central en… train. Soit, une semaine que je ne suis pas prêt d’oublier.

Michel CHRISTIANE

Crédit photo : Rijeka Sports

*merci à Claude Dujardin (AWBB), grand argentier de l’équipe nationale depuis une trentaine d’années