Michel Nihon est indissociable de l’Etoile Jupille, tout comme ce club ne peut être envisagé sans son emblématique entraineur. Vainqueur de la Coupe et en bonne voie pour rejoindre l’élite provinciale au terme de la saison, il était grand temps de partir à la rencontre du mentor jupillois. Discussion à bâtons rompus avec un vrai passionné et un clubman d’exception.
Michel comment en es-tu arrivé à fonder l’Etoile Jupille en 1992?
C’est une décision que j’ai prise avec mon papa. J’avais pas mal bourlingué dans différents clubs de la Province et, déjà, j’avais une vision révolutionnaire qui ne plaisait pas forcément à tout le monde. Après en avoir longuement discuté avec mon paternel, nous nous sommes dit qu’au lieu de nous disputer avec des comités, mieux valait créer notre propre entité.
Avec quelles ambitions?
Au départ, nous étions simplement une équipe de potes mais nous nous sommes pris au jeu et nous avons été champions dès notre première année, devant deux cents spectateurs. Depuis lors, il y a eu des montées et des descentes mais nous pouvons nous targuer d’un joli bilan: huit titres de champion et une Coupe de la Province.
Sur les vingt-six années d’existence que compte le club, combien en as-tu passées sur le banc comme entraineur principal?
J’en suis à ma vingtième saison. Les six premières années, j’étais manager sportif et puis j’ai décidé de reprendre le coaching, tout en gardant la fonction de manager sportif. Ce cumul est possible lorsque l’on évolue en provinciales.
J’imagine qu’avec une telle expérience, le basket liégeois n’a plus de secret pour toi…
En effet, j’ai coaché à tous les échelons: P4, P3, P2, P1, D4 (ndlr: lorsqu’elle existait encore) et R1. Je connais tous les joueurs, tous les coachs et toutes les salles par coeur.
Qu’est-ce qui te plaît tant dans le coaching?
L’adrénaline naturelle, présente à tous les matchs, que procure ce sport dont je suis passionné. Même si je suis plus calme qu’avant, je ressens toujours cette excitation avant et pendant les rencontres. Je reconnais d’ailleurs que je préfère les matchs et leur decorum, aux entrainements.
« L’Etoile, un club à part »
L’Etoile possède une réputation toute particulière, à quoi est-ce dû d’après toi?
C’est indubitable, l’Etoile, et sa salle, offrent une ambiance toute particulière. Nous avons la chance de pouvoir compter sur un public nombreux -régulièrement plus de cent personnes- et connaisseur, qui offre une saveur tout à fait spéciale à nos rencontres. J’ai d’ailleurs toujours des frissons lorsque nous évoluons à domicile.
De là à parler de club mythique?
Un club à part, certainement, mythique, pourquoi pas. Il existe chez nous une réelle osmose entre joueurs, staff et supporters et nous drainons de plus en plus de partenaires. Si j’osais, et j’ose, je comparerais l’Etoile et le Standard pour cette ferveur qui anime les deux clubs et leurs sympathisants. Nous avons eu aussi la chance de remporter plusieurs titres et d’avoir pu compter dans nos rangs, tout au long de ces années, la plupart des meilleurs basketteurs liégeois. Je les remercie d’ailleurs tous, chaleureusement, de m’avoir fait confiance.
D’autant que vous ne payez pas vos joueurs?
Tout à fait, il n’y a pas de défraiement chez nous. Lorsque nous sommes redescendus de P1 en P4, les caisses étaient vides et nous avons décidé qu’il n’y aurait plus d’argent qui circulerait. Ceci dit, pour ce qui est de boire et manger, nos joueurs sont quand même bien gâtés (rires).
Cet amour de la vie et des bonnes choses se ressent au sein du club qui multiplie les évènements pour rassembler la communauté de l’Etoile…
Absolument. Nous organisons trois gros soupers par an. Lors du dernier, nous sommes parvenus à rassembler cent-cinquante personnes. Nous organisons également deux grands tournois, dont un qui aura lieu la semaine prochaine et lors duquel vingt-quatre équipes s’affronteront trois jours durant. Un long weekend pendant lequel notre buvette sera ouverte pratiquement non-stop. Nous avons aussi comme tradition de faire la présentation de la nouvelle équipe début juin, autour d’un barbecue, pour clore idéalement la saison.
« J’ai des frissons aux Argilières »
Tout ça dans la légendaire salle des Argilières. Beaucoup d’observateurs disent que cette salle est un réel atout pour celui qui y évolue à domicile…
J’adore notre salle et elle se prête à proposer différentes défenses de zone, même si chaque entraineur fait ses choix. Personnellement, je connais celle (ndlr: la salle) que j’appelle « le petit chaudron de Jupille » sur le bout des doigts. Lorsque des nouveaux joueurs débarquent chez nous, je leur montre comment se servir des espaces et cela les rend très forts.
Voici quelques semaines, vous avez remporté, avec votre P2, la Coupe de la Province contre la P1 de Waremme. Qu’est-ce que cela représente pour toi?
C’est un véritable accomplissement dans ma « carrière » sportive, je ne m’en cache pas. J’en rêvais et c’était l’année où jamais car, à cinquante ans, l’occasion risque bien de ne plus se représenter.
A quel moment vous êtes-vous dit que vous pouviez ramener ce trophée à la maison?
Sans doute après notre victoire à Aubel, alors leader de P1, en quart de finale. Nous avons eu un tirage démentiel, et la surprise que nous avons créée là-bas, en livrant une superbe prestation, nous a convaincu que nous pouvions forger un exploit. Mais l’objectif prioritaire du club était, et est, de remonter en première provinciale. L’Etoile se doit de rejoindre notre élite provinciale.
« C’est quoi dix mois dans une vie? »
Du coup, la déception de votre défaite au tour final contre Alleur en fin de saison dernière a dû perturber vos plans…
Nous avons raté notre tes-match, c’est indéniable et ce fut un gros coup de massue. Mais je me suis vite relevé, comme à chaque fois.
Pourtant, vu la qualité de ton effectif, cela n’a pas dû être facile de convaincre des joueurs tels que les tiens, qui possèdent de fameux pedigree, de rempiler?
Quelques jours après notre défaite, j’ai réuni mes gars et je leur ai demandé ce que représentaient dix mois dans une vie. Je leur ai assuré que nous allions tout mettre en oeuvre pour être champions et je n’avais pas tort.
Tu as même su renforcer un groupe déjà impressionnant…
Je voulais garder notre équipe telle quelle, mais je sentais qu’il manquait un petit quelque chose. La venue de Vincent Theek, mon joueur fétiche et qui avait déjà évolué en P1 avec l’Etoile, nous a beaucoup apporté, tout comme celles de Nathan et David qui sont de vraies plus-values. Nous sommes bien plus complets cette année.
De quoi envisager sereinement la fin du championnat, malgré le joker grillé contre Tilff?
L’euphorie de la Coupe est retombée et nous sommes à nouveau concentrés sur notre objectif principal. Nous avons parcouru une grande partie du chemin, il nous reste à conclure, pour être sacrés dans quelques semaines.
Votre saison aurait pu basculer à Sainte Walburge, où vous étiez menés de près de trente points avant de revenir dans la partie et de vous incliner en sauvegardant l’average. D’aucuns ont pu être surpris en voyant les scènes de liesse malgré la défaite?
Conserver l’average sur Sainte Walburge était indispensable et, au vu du déroulement du match, c’était une vraie satisfaction d’y arriver. Lors de cette rencontre, mes gars ont montré qu’ils formaient un vrai groupe, chose nécessaire pour revenir ainsi du diable vauvert. J’ai d’ailleurs la chance de pouvoir compter sur des gars très réceptifs et présents aux entrainements, ce qui me permet de beaucoup travailler en cinq contre cinq, comme je l’affectionne.
A égalité avec Bellaire et les Sang et Marine, vous êtes quand même favoris pour accéder à la première provinciale. Quels seront vos objectifs la saison prochaine si vous êtes en P1?
Nous serons compétitifs, c’est certain. Pour en avoir déjà parlé entre nous, nous voulons être, à domicile, la bête noire des autres équipes. Que celles-ci craignent de se rendre dans notre petite salle. Et pourquoi ne pas viser les Playoffs?
Tu es satisfait de votre recrutement?
Mon envie était de conserver intacte notre ossature mais deux joueurs devaient nous quitter, malheureusement. Guillaume Grégoire part à l’étranger et Gilles Simon déménage à Namur. Il fallait donc les remplacer. Je suis heureux de l’arrivée de Nicolas Baudouin qui va apporter le petit plus nécessaire pour la P1 et qui sera une vraie plus-value pour le groupe. Trouver un intérieur pour remplacer Guillaume fut plus compliqué mais je suis très content de pouvoir compter sur le renfort de Jean-Roch Bonhomme, qu’on ne présente plus. C’est le fruit d’un travail acharné, de la part de Patrick Noel et moi-même, et je suis plus que satisfait.