Les Carnets du basketteur, saison 2! En près de quarante ans de carrière, Michel Christiane a accumulé une kyrielle de souvenirs et d’anecdotes. De Fond-de-Forêt à Barcelone. Dans cette chronique, coup d’éclairage sur ceux sans qui la pratique de notre sport favori serait impossible: les bénévoles.
Vous l’avez peut-être appris en début de semaine : Antoinette Bouché a été fêtée pour ses 85 printemps, dimanche, à Grivegnée. Il y a donc une septantaine d’années qu’elle fréquente nos salles, en général, et celle de la rue Nicolas Spiroux, en particulier. Antoinette, c’est l’exemple-type de la bénévole constituant une race en voie de disparition. Antoinette, c’est, aussi, « Titine* au baskè ». Et ceci n’a rien de péjoratif car j’entends souligner ainsi sa gouaille et son esprit frondeur viscéralement attachés à la Cité ardente. Pour mieux situer le personnage, ce souvenir… Nous sommes à l’époque où la JS Grivegnée évolue en D2 nationale sous la conduite de Jacques Paquay, le « roi de la zone ». Comme tous les quinze jours, Antoinette officie à la table. Au fil du match, sa mine s’allonge. C’est qu’elle n’apprécie guère la façon dont ses favoris sont traités par les arbitres. A un temps mort, elle ne se gêne d’ailleurs pas pour leur faire comprendre son point de vue. Rien ne s’arrange vraiment par la suite et, à l’arrêt de jeu suivant, elle quitte la table. Aussi furieuse que théâtrale. Même son mari de René – pourtant un coriace délégué de la FGTB – n’est jamais parvenu à la calmer…
A l’heure actuelle, on a trop tendance à ignorer l’importance essentielle de ces « travailleurs de l’ombre ». Souvent critiqués, rarement remerciés. D’où le témoignage d’un d’entre eux désirant rester anonyme : « Presque chaque samedi, j’arrive à la salle à 9 heures. Question de voir si tout est nickel… ce qui n’est pas toujours le cas. J’accueille ensuite les arbitres. Quand il y en a. Pendant les rencontres, j’apporte de l’eau aux équipes et prend en charge les petits bobos des jeunes joueurs des deux camps. En fin d’après-quatre heures, je reconditionne les lieux en vue des matches seniors de la soirée. Et rebelote avec les arbitres et les boissons. Sans oublier de donner un coup de main aux entrées. Au dernier coup de sifflet, il faut encore remettre en ordre terrain et vestiaires. Et il n’est pas loin de minuit quand je regagne mon domicile. C’est harassant, mais j’aime ça. » Qu’ajouter de plus ?
Autre illustration de ce qui constitue quasi un sacerdoce. Du moins aux yeux de certains. Si le RBC Cointe est une des valeurs sûres de notre basket principautaire (deux équipes en Régionales et une kyrielle de formations d’âge), c’est sans conteste à l’incroyable fidélité de ses dirigeants qu’il le doit. Jugez plutôt : Jean Levoz, l’incontournable secrétaire, a pris en charge ses fonctions en 1978. Il y a donc 41 ans. Et c’est loin d’être terminé… C’est en ’86 qu’il a été rejoint par Fernand Dewever et par Freddy Tilman qui, à l’heure actuelle, sont encore le président et le trésorier des « Grenouilles ». Autrement dit, ce trio hors du commun compte… 107 saisons au service non-stop du cercle de la Plaine des Sports.
On terminera par le genre de « mot » que me tenait parfois Pierre Raskin, le regretté dirigeant de Pepinster. Il m’évoquait ainsi l’offre de service qu’avait formulée au club – alors à son apogée en D1 – un Verviétois bien connu dans les milieux pongistes et cyclistes. « Si nous avions accepté ses propositions, il serait sans problème devenu le « bénévole » le mieux payé du pays… » Sous ses airs de clerc de notaire (qu’il était), Pierre savait manier un redoutable humour au second degré.
Michel CHRISTIANE
*Pour les plus jeunes : Titine (de son vrai nom Henriette Brenu) était une humoriste typiquement liégeoise (grand cœur, mais n’ayant pas sa langue en poche) qui est notamment à l’origine de nombreux sketches enregistrés chez Philips. Une place lui est dédiée près de la Médiacité.